Un parc routier alourdi face à des barrières figées dans les années 90

Conçues à une époque où le véhicule moyen pesait autour de 1 200 kg, les glissières de sécurité italiennes n’ont jamais été mises à jour pour supporter la masse des SUV et voitures électriques actuels. En 2024, les modèles électriques et les crossovers familiaux franchissent régulièrement la barre des 1 800 kg à vide. Cette évolution du poids met en défaut la capacité de retenue des barrières conçues il y a plus de 30 ans.

Pourquoi le surpoids menace la performance des barrières

Les dispositifs de sécurité routière sont classés selon la norme européenne EN 1317, qui définit leur capacité à absorber l’énergie d’un choc de véhicule donné. En pratique :

  • Les barrières certifiées « TL2 » (Test Level 2) sont dimensionnées pour des véhicules jusqu’à 1 350 kg à 70 km/h.
  • Les glissières « TL3 », courantes dans les années 90, assurent une résistance pour des véhicules jusqu’à 1 500 kg à 100 km/h.
  • Au-delà, seuls les modules « TL4 » et « TL5 » – rares sur le réseau italien – sont prévus pour des poids et vitesses supérieurs, mais restent limités en nombre.
  • Or, lorsque le véhicule pèse près de 2 000 kg et heurte une glissière TL3 à 100 km/h, la force d’impact dépasse de 30 % la capacité nominale. Le risque de rupture ou de franchissement de la glissière s’en trouve considérablement accru, exposant conducteurs et passagers à des sorties de route bien plus graves.

    Un bilan routier préoccupant : 3 030 morts et 233 853 blessés en 2024

    Les derniers chiffres de l’ISTAT révèlent :

  • 3 030 décès sur les routes en 2024, soit une hausse de 4,1 % par rapport à 2023.
  • 233 853 personnes blessées.
  • 173 364 accidents recensés.
  • Ces statistiques montrent que la mortalité routière reste loin de l’objectif communautaire, qui vise à réduire de moitié le nombre de victimes d’ici 2030. Sans action rapide, la France, l’Italie et d’autres États membres risquent de manquer cette ambition, d’autant plus que la masse des véhicules continue d’augmenter.

    Le cri d’alarme d’AISICO et d’ANSFISA

    L’AISICO, institut italien spécialisé dans la certification des systèmes de sécurité routière, et l’ANSFISA, l’organisme public de contrôle, demandent une révision urgente des normes. Selon Ottavia Calamani, CEO d’AISICO : « Nous avons fait évoluer moteurs, électronique, batteries et aides à la conduite, mais oublié l’élément qui doit nous sauver quand tout échoue : les barrières. »

    En préparation de la Journée mondiale du souvenir des victimes de la route (16 novembre), l’ANSFISA a émis une circulaire à l’attention d’ANAS, des Régions, Provinces et Communes pour :

  • Inventorier toutes les glissières sur le réseau avant fin 2026.
  • Classer leur niveau de résistance selon la nouvelle grille de performance.
  • Définir un plan prioritaire de remplacement ou de renforcement des barrières les plus vulnérables.
  • Mettre en place un suivi digital continu via capteurs de contrainte sur les modules critiques.
  • Mesures recommandées pour moderniser les infrastructures

    • Mettre à jour la réglementation nationale afin d’aligner les normes sur la dernière version de la norme EN 1317, introduisant des classes supérieures (TL4 et TL5) pour les secteurs à fort trafic de SUV et véhicules lourds.
    • Réhabiliter ou remplacer, chaque année, au moins 10 % des glissières les moins résistantes par des modules plus performants (TL4/TL5).
    • Installer des systèmes de surveillance en temps réel – jauges de déformation ou capteurs d’impact – pour détecter immédiatement toute dégradation après un choc mineur.
    • Allouer un budget pluriannuel dédié aux travaux de renforcement, proportionnel au pourcentage de véhicules dépassant 1 800 kg dans la zone concernée.
    • Former les services techniques locaux aux nouvelles procédures d’installation et de maintenance des barrières nouvelle génération.

    Impacts pour les automobilistes et les collectivités

    Pour le conducteur, l’absence de glissières adaptées augmente le risque de chute dans le fossé, d’emportement dans le sens inverse ou de collision frontale après franchissement direct. Côté gestion territoriale :

  • Les collectivités risquent des contentieux plus fréquents en cas d’accident grave lié à un équipement défaillant.
  • Les assurances pourraient réviser à la hausse les primes pour les zones identifiées à risque.
  • Les marchés publics devront intégrer ces nouveaux critères de résistance dans les appels d’offres.
  • Conseils pratiques pour circuler prudemment

    • Éviter la vitesse excessive, surtout sur les portions non modernisées où la barrière ne garantit pas un confinement correct.
    • Repérer les zones rurales à faibles contrôles d’élagage : une glissière envahie par la végétation perd jusqu’à 40 % de son efficacité.
    • Signaler toute barrière visiblement endommagée aux autorités locales via les applications municipales ou le service « Signalement » du ministère.
    • Pensez à réduire la pression de vos pneumatiques de 0,2 bar en zone accidentogène pour augmenter la surface de contact et la stabilité latérale.

    La modernisation des glissières de sécurité n’est pas un simple chantier technique, mais un enjeu de vie ou de mort pour tous les usagers. Les initiatives d’AISICO et d’ANSFISA doivent être soutenues par un calendrier strict et une mobilisation généralisée des pouvoirs publics.

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