Genèse et vision éco-responsable du Ford Model U
Présenté au North American International Auto Show de Detroit en 2003, le Ford Model U se voulait l’héritier spirituel de la mythique Model T. Mais là où son ancêtre a démocratisé l’automobile au début du XXᵉ siècle, le Model U affichait une ambition résolument tournée vers la durabilité et l’écoresponsabilité. Conçu comme un prototype fonctionnel, il alliait modularité, technologies avancées et matériaux renouvelables pour dessiner une voiture « cradle-to-cradle » : un cycle de vie complet où chaque composant peut retourner à la nature.
Motorisation hybride hydrogène : un pari technique
Au cœur du concept Ford, on trouve un bloc 2,3 litres quatre cylindres, suralimenté et refroidi par air. Hérité de la Ford Ranger de l’époque, ce moteur a été retravaillé pour fonctionner à l’hydrogène. Quelques chiffres clés :
- Puissance : 151 CV combinés à l’assistance d’un module électrique.
- Consommation théorique : 19 km / l (équivalent hydrogène), pour une autonomie annoncée de 480 km.
- Partenaires techniques :
- Dynatek : conception des réservoirs haute pression pour le stockage d’hydrogène.
- Quantum : optimisation des injecteurs pour un dosage précis du gaz.
- Sun Microsystems : développement de l’électronique embarquée et du logiciel de gestion énergétique.
Le système hybride permettait d’alterner selon le besoin entre le moteur à hydrogène et l’appui électrique, offrant à la fois réactivité instantanée et autonomie accrue.
Transformation SUV/pick-up : ingéniosité mécanique
L’un des traits les plus spectaculaires du Model U est son toit en toile électrique rétractable, couplé à un hayon arrière automatisé. En quelques secondes, le SUV se métamorphose en pick-up :
- Toit en toile escamotable : large position ouverte pour le chargement vertical.
- Portillon arrière à rétraction automatique : transforme le coffre en benne, avec une surface de chargement à fleur de plancher.
- Mécanisme modulaire : charnières et vérins hydrauliques synchronisés pour garantir une transition fluide.
Ce concept de carrosserie transformable anticipait déjà les tendances de modularité, bien avant que le marché ne s’oriente vers des utilitaires polyvalents.
Habitacle modulable et technologies embarquées
À l’intérieur, le Model U adoptait un agencement minimaliste et fonctionnel :
- Système à fentes (« slots ») dans les panneaux latéraux pour stocker objets et bagages sans surcharger l’habitacle.
- Panneau de bord digital : commandes tactiles pour climat, navigation et infotainment, reposant sur une interface graphique conçue par Sun Microsystems.
- Sièges aux mousses biosourcées, facilement amovibles pour libérer de l’espace ou pour installer des modules de rangement.
Cette approche modulable visait à répondre tant aux besoins d’un conducteur citadin qu’à ceux d’un amateur de loisirs nécessitant un volume de chargement important.
Matériaux biosourcés et philosophie cradle-to-cradle
Le point fort du Model U réside dans sa carrosserie composée à 95 % de matériaux recyclables ou biodégradables :
- Panneaux extérieurs en résine à base de soja.
- Mousses des sièges et tapis de sol en polymères issus du maïs.
- Pneumatiques Goodyear fabriqués avec des gommes et additifs végétaux.
- Huiles et graisses lubrifiantes extraites de tournesol et de soja, en collaboration avec l’Université de l’Iowa.
À la fin de sa vie, chaque composant était conçu pour retourner au sol sous forme de nutriments, fermant ainsi la boucle d’un cycle de production pleinement respectueux de l’environnement.
Écho et héritage sur l’industrie automobile
Si le Model U n’a jamais donné naissance à un modèle de série, son influence se retrouve dans plusieurs lignes directrices actuelles :
- L’essor des éditions spéciales « vertes » intégrant des matériaux recyclés (brake pads en fibres naturelles, plastiques biocomposites).
- Les prototypes à hydrogène, revisités aujourd’hui par plusieurs constructeurs comme Hyundai et Toyota, qui explorent désormais l’hybridation hydrogène-électrique.
- Les SUV modulables et les véhicules à empattement adaptable, reflétant une demande croissante pour des engins polyvalents, entre citadin et utilitaire.
Au volant des routes d’Occitanie, on peut saluer ce concept visionnaire qui, dès 2003, a voulu réconcilier performance, modularité et respect de la planète. Une belle leçon de prospective, restée intacte dans son esprit mais qui reste à traduire en solutions de mobilité durable.