Les origines de Bugatti Rimac

En 2021, la fusion entre Bugatti et Rimac a donné naissance à Bugatti Rimac, une coentreprise unique qui associe le savoir-faire historique de la marque française et l’expertise électrique de Rimac. Porsche apportait alors 45 % du capital, Mate Rimac en détenait 35 % et Hyundai 11 %, le reste étant réparti entre divers investisseurs. L’objectif initial ? Concevoir des hypercars électriques de nouvelle génération, combinant luxe, performances extrêmes et technologies de pointe.

Mate Rimac vise le contrôle total

Seulement quatre ans plus tard, le fondateur croate Mate Rimac souhaite modifier en profondeur l’équilibre de la joint-venture. Selon son interview à Bloomberg, il a fait une offre à Porsche pour racheter ses 45 % de participation, à hauteur d’environ 1 milliard d’euros. Cette opération, présentée dès avril, serait soutenue par un pool d’investisseurs déjà identifiés. Pourquoi ? Rimac souhaite « prendre des décisions à long terme sans devoir expliquer chaque projet à une cinquantaine de personnes », confie-t-il.

  • Montant estimé de l’offre : ~1 milliard d’euros.
  • Calendrier envisagé : clôture possible d’ici 2026.
  • Répartition actuelle du capital : Rimac 35 %, Porsche 45 %, Hyundai 11 %, autres investisseurs 9 %.
  • Si Porsche se retirait, elle garderait 22 % du groupe Rimac hors hypercars.

Une performance financière encore fragile

Malgré un chiffre d’affaires global de près de 259 millions d’euros en 2024, le groupe Bugatti Rimac a enregistré une perte nette cumulée de presque 90 millions. Plusieurs postes expliquent ce déficit :

  • Bugatti Rimac Hypercars : 74 millions de revenus, perte nette de 158 millions (augmentation des coûts opérationnels de +56 %).
  • Rimac Technology : 140 millions de revenus (+41 %), mais 65 millions de pertes dues aux investissements R&D et à la montée en puissance de la production.
  • Rimac Group (holding) : 13 millions de revenus, pertes multipliées par 10 par rapport à l’année précédente.

Ce déficit global reflète les coûts élevés liés au développement d’hypercars et de technologies de propulsion électrique, mais aussi un personnel qui dépasse désormais les 600 salariés. Pour Mate Rimac, l’enjeu est de convertir ces investissements massifs en ventes rentables, et pour cela, disposer d’une gouvernance plus agile est essentiel.

Les défis de Porsche et l’impact sur la joint-venture

Porsche, de son côté, traverse une période de questionnements stratégiques. Le CEO Oliver Blume a récemment déclaré que le modèle économique actuel « ne fonctionne plus », notamment face à la concurrence accrue sur le marché chinois des véhicules électriques et aux exigences réglementaires. Cette pression pèse sur l’ensemble du groupe Volkswagen et, indirectement, sur sa participation chez Bugatti Rimac.

  • Concurrence en Chine : ouverture à de nouveaux acteurs EV chinois, pression sur les prix et marges.
  • Normes européennes : renforcement des exigences en matière d’émissions, accélération de la transition électrique.
  • Gouvernance familiale Porsche-Piëch : influence encore forte, parfois jugée trop conservatrice par les nouveaux entrants comme Rimac.

Quelle hypercar pour l’avenir ?

Si l’opération se concrétise, Bugatti Rimac pourrait entrer dans une nouvelle phase sous la direction exclusive de Mate Rimac. Après le Concept_One en 2011 et la Nevera en 2022 — une hypercar électrique de 1 914 ch devenue la plus rapide du monde — la suite promet d’être audacieuse :

  • Une roadmap technique accélérée, avec des plateformes 100 % électriques dédiées aux hypercars.
  • Des synergies renforcées entre les savoir-faire carrosseries Bugatti et l’ingénierie électrique Rimac.
  • Un positionnement sur des volumes de production légèrement supérieurs à la Nevera, sans perdre l’exclusivité de l’hyperluxury.
  • Un développement de technologies à destination d’autres marques du groupe, pour rentabiliser les investissements R&D.

En Occitanie, où je parcours régulièrement les routes vallonnées et pittoresques, l’arrivée de ces nouvelles hypercars électriques pourrait marquer un tournant pour l’image du sport automobile, en associant performances de pointe et engagement durable.

Les prochaines étapes et enjeux d’ici 2026

Plusieurs verrous restent à lever avant la conclusion du rachat :

  • L’accord final avec la famille Porsche-Piëch et les instances du groupe Volkswagen.
  • Les validations réglementaires en Europe, notamment en matière de contrôle des investissements étrangers.
  • La structuration financière du prêt ou de l’émission d’actions pour lever le milliard nécessaire.
  • La redistribution du capital après rachat, avec un maintien possible de certains actionnaires minoritaires.

Les amateurs de belles mécaniques et d’innovation suivront avec attention cette saga financière, qui pourrait redessiner le paysage des hypercars électriques d’ici deux ans à peine.