Une compacte née pour bousculer les codes
En 1965, alors que les berlines trois volumes règnent en maître sur les routes européennes, Renault dégaine un tout nouveau concept : une familiale compacte à deux volumes, élégante et spacieuse. La Renault 16, lancée sous l’impulsion de Pierre Dreyfus, président visionnaire du constructeur, incarne une rupture totale avec les conventions de l’époque. Saluée par Stirling Moss comme « l’automobile conçue avec plus d’intelligence jamais vue », la R16 s’est imposée dès son lancement comme une icône de l’innovation automobile.
Un design audacieux et fonctionnel
Confiée en 1961 au jeune Bureau de Style de Renault, la création de Gaston Juchet se distingue par :
- Quatre portes latérales pour faciliter l’accès à bord, une première sur un modèle familial compact.
- Un grand hayon arrière et trois vitres latérales de chaque côté, offrant une visibilité et une polyvalence inédites.
- Des lignes fluides et élégantes, qui marient la sobriété d’une berline à l’ergonomie d’une familiale.
De la conception à la production, moins de quatre ans se sont écoulés : un exploit qui a nécessité la construction d’une usine dédiée à Sandouville, en Normandie. Présentée au Salon de Genève en mars 1965, la R16 a immédiatement fait sensation.
Des aménagements intérieurs modulables comme jamais
À l’intérieur, Renault offre une modularité jusqu’alors inconnue sur une voiture de série :
- Banquette arrière repliable, déplaçable de 15 cm ou complètement amovible, pour faire passer le volume du coffre de 346 à 1 200 litres.
- Position « maman » du siège passager avant, qui se rabat pour surveiller un enfant endormi à l’arrière.
- Possibilité de ranger la banquette sous le toit et d’adosser les coussins contre les sièges avant, transformant l’habitacle en véritable salon roulant.
De larges portières et une hauteur sous plafond généreuse accueillaient même les chapeaux, alors courants chez les gentlemen. La couverture amovible du coffre permettait de masquer les courses – pratiques pour dissimuler les odeurs de poisson ou de fromage après un marché dominical.
Une mécanique avant-gardiste
Sur le plan technique, la Renault 16 ne fait pas dans la demi-mesure :
- Moteur 1,5 L entièrement en aluminium, développant 55 ch à ses débuts, puis 83 ch sur la version TS de 1968, et jusqu’à 93 ch sur la TX de 1973.
- Implantation originale du moteur : presque centrale, avec le boîtier de vitesse placé en avant, pour répartir 55 % du poids sur le train avant et améliorer tenue de route et maniabilité.
- Suspension arrière à barre de torsion héritée de la R4, gage d’un confort remarquable et d’une grande capacité de chargement.
- Décalage du train avant, le voie gauche étant plus longue de 67 mm que le côté droit, une subtilité invisible pour le conducteur mais révélatrice d’un soin poussé dans l’équilibre du châssis.
Une carrière couronnée de succès
Les chiffres parlent d’eux-mêmes :
- Première année pleine de commercialisation (1966) : près de 69 000 unités immatriculées en France.
- Pic mondial en 1970 : plus de 193 000 Renault 16 produites.
- Distinction « Auto de l’année » décernée en 1965, une consécration qui faisait écho au trophée déjà obtenu par la R4 en 1961.
- Exportation dès 1969 vers le Canada et les États-Unis, où la R16 suscite l’admiration des essais longue distance.
En 1971, la Renault 16 livre son premier restylage avec des feux arrière agrandis et plus rectangulaires. La version TX, apparue en 1973, devient le haut de gamme ultime avant l’arrivée en 1975 de la Renault 20. Malgré ces évolutions, la R16 conserve une base fidèle, vendant encore plus de 100 000 exemplaires en 1976.
Fin d’une ère et legs historique
Après 15 ans de carrière, la production s’arrête en janvier 1980, laissant derrière elle 1 845 959 exemplaires. L’héritage de la Renault 16 se mesure aujourd’hui encore dans la modularité des habitacles modernes et la démocratisation de la traction avant sur les familiales. Son esprit novateur a inspiré de nombreux constructeurs à repenser l’agencement intérieur et l’ergonomie de leurs modèles.
Astuces d’entretien pour préserver une R16 d’époque
- Vérification régulière des barres torsion arrière et remplacement des silentblocs pour maintenir le confort originel.
- Contrôle et tension de la courroie de distribution en aluminium, afin d’éviter usure prématurée et surchauffe.
- Préservation de la peinture et des caoutchoucs d’étanchéité des larges ouvrants pour limiter la corrosion en zones humides.
- Entretien soigné du hayon et de ses charnières : lubrification annuelle pour garantir une manœuvre fluide et sans grincement.